Le bilan du violent séisme qui a frappé le 6 février la Turquie et la Syrie s’élève ce lundi soir à 35.224 morts, selon les derniers bilans officiels. Le tremblement de terre de magnitude 7,8 a fait 31.643 morts dans le sud de la Turquie, a annoncé lundi l’Afad, organisme public turc de gestion des catastrophes, tandis que les autorités ont dénombré 3.581 morts en Syrie.
Sept jours après la première secousse, l’espoir de retrouver des survivants s’amenuise, même si des survivants sont encore miraculeusement retrouvés sous les décombres. Ce lundi soir, le chef de l’ONU a annoncé que la Syrie avait accepté d’ouvrir deux nouveaux points de passage pour acheminer l’aide humanitaire.
L’essentiel
Le bilan est désormais d’au moins 35.224 morts, dont 31.643 en Turquie et 3.581 en Syrie
Les secouristes parviennent encore à sortir des survivants des décombres, une semaine après le tremblement de terre, même si les chances de survie s’amenuisent
L’hôpital de campagne promis par Paris à la Turquie a quitté la France dimanche matin
Damas accepte d’ouvrir deux points de passage transfrontaliers, a annoncé le chef de l’ONU.
Des sauvetages miraculeux
D’après les derniers bilans officiels, le tremblement de terre du 6 février, de magnitude 7,8, a fait au moins 35.225 morts, dont 31.643 en Turquie et 3.581 en Syrie. « Il est difficile de donner un bilan précis car nous devons passer sous les décombres, mais je suis sûr qu’il doublera, ou plus », a déclaré samedi Martin Griffiths, en visite dans la ville turque de Kahramanmaras, épicentre du tremblement de terre.
Sept jours après la première secousse, l’espoir de retrouver des survivants s’amenuise. Mais en Turquie, des cas de sauvetages miraculeux bien au-delà de la période cruciale de 72 heures après la catastrophe continuent d’être rapportés par les secours et les médias. Au cours de la nuit de dimanche à lundi, sept personnes ont été dégagées vivantes en Turquie, selon la presse.
Parmi ces survivants, une femme et un enfant ont été sortis vivants des décombres dimanche par une équipe de Salvadoriens à Sehit Aileleri, a annoncé le président salvadorien Nayib Bukele. « L’équipe de secouristes salvadoriens, avec le soutien de secouristes turcs, viennent de réussir le sauvetage de deux survivants, une femme et un enfant, après plus de 150 heures passées sous les décombres », a écrit le président Bukele sur Twitter.
À Hatay, une femme de 63 ans, Hafsa Dagci, a été retirée des décombres 158 heures après le séisme. À Adiyaman, une femme de 23 ans, Elif Kirmizi, a pu être sauvée 153 heures après le séisme, une heure après le sauvetage de sa soeur Rabia, une professeure de 28 ans. Mustafa Sarigul, 35 ans, a quant à lui été sauvé à la 149e heure à Hatay par des gendarmes turcs et des équipes venues d’Italie et de Roumanie, après douze heures d’efforts pendant lesquels l’homme chantait sous les décombres pour garder le moral.
Des secouristes menacés
Certaines équipes de secouristes internationaux doivent cependant faire face à des menaces. L’ONG israélienne United Hatzalah a annoncé dimanche l’arrêt de ses opérations en Turquie en raison d’une « menace sérieuse » contre la sécurité de son équipe. Mais elle a refusé de donner plus de détails sur la nature de la menace ou la source des renseignements. « Nous avons malheureusement reçu des renseignements sur une menace concrète et immédiate contre la délégation israélienne et nous devons privilégier la sécurité de notre personnel », explique simplement l’ONG. En revanche le Magen David Adom, équivalent israélien de la Croix-Rouge, continue aussi d’oeuvrer en Turquie, a assuré un porte-parole à l’AFP.
Samedi, l’armée autrichienne avait suspendu pendant quelques heures ses opérations de sauvetage en Turquie, invoquant « la situation sécuritaire ». « Il y a eu des agressions entre des groupes », avait déclaré à l’AFP un porte-parole de l’armée à Vienne, sans plus de détails. Trois organisations allemandes avaient également suspendu leurs opérations, évoquant des « affrontements entre différentes factions ».
L’hôpital de campagne français est arrivé
L’hôpital de campagne promis par Paris à la Turquie est arrivé à Gaziantep dimanche en fin de journée, a annoncé le ministère des Affaires étrangères. La France avait annoncé le 7 février le déploiement de son hôpital de campagne basé dans le Gard, une structure de près de 2.000 mètres carrés disposant d’un bloc d’accouchement, de deux blocs opératoires, d’un laboratoire, d’une pharmacie, d’un local de stérilisation et d’une unité de réanimation, ainsi que de salles d’accueil et de suivi des blessés.
Cet hôpital mobile « sera autonome pour 15 jours minimum et pourra assurer, en plus d’autres soins plus légers, de 10 à 15 interventions chirurgicales par jour », ont précisé dans un communiqué les pompiers du Gard. Connu sous le nom d' »Elément de sécurité civile rapide d’intervention médicale », ou « Escrim » en abrégé, son dernier déploiement date de la pandémie de Covid-19 : il avait été engagé en Guyane en juin 2020, puis à Mayotte en janvier 2021, pour soutenir les structures hospitalières locales.
Damas accepte d’ouvrir deux points de passage transfrontaliers
Le président syrien a accepté d’ouvrir deux nouveaux points de passage transfrontaliers entre la Turquie et le nord-ouest de la Syrie pour trois mois pour acheminer l’aide humanitaire aux victimes du séisme, a annoncé ce lundi soir le secrétaire général de l’ONU. « Je salue la décision aujourd’hui du président syrien Bachar al-Assad d’ouvrir les deux points de passage de Bab Al-Salam et Al Ra’ee entre la Turquie et le nord-ouest de la Syrie pour une période initiale de trois mois », a déclaré Antonio Guterres dans un communiqué.
Le seul point de passage opérationnel depuis la Turquie vers les zones rebelles ravagées par le séisme, Bab al-Hawa, a été endommagé pendant le tremblement de terre. L’aide y transite à nouveau depuis jeudi, mais des appels se multipliaient pour que d’autres points de passage frontaliers soient ouverts.
Des arrestation d’entrepreneurs
En Turquie, l’effondrement brutal de bâtiments, qui trahit leur médiocre construction et n’a laissé pratiquement aucune chance à leurs résidents, suscite la colère. Les médias turcs ont annoncé l’arrestation d’une douzaine d’entrepreneurs du secteur du bâtiment dans le sud du pays. D’autres interpellations sont attendues.
La photo d’un promoteur arrêté alors qu’il tentait de fuir à l’aéroport d’Istanbul vendredi a fait le tour de la toile, les internautes demandant sa tête. Mehmet Yasar Coskun était le maître d’ouvrage de la résidence « Rönesans » (Renaissance), construite à Antakya, dans le sud de la Turquie, il y a 10 ans : le 6 février, l’immeuble de huit étages et 250 appartements avec piscine, qui abritait notamment le footballeur ghanéen Christian Atsu, a basculé sur le flanc et sur ses habitants.
Face à la colère qui gronde dans le pays contre les mafias du bâtiment, relayée par la presse et les réseaux sociaux, les autorités turques ont réagi avec promptitude et les arrestations et mandats d’arrêt pleuvent. Dimanche, trois personnes ont été écrouées, sept interpellées dont deux autres promoteurs qui tentaient de s’échapper en Géorgie, et 114 sont toujours recherchées, a annoncé le ministre turc de la Justice, Bekir Bozdag. Au total, 134 enquêtes ont été lancées.
Après le violent tremblement de terre de 1999, qui avait fait 17.000 morts dans le nord-ouest de la Turquie, autour de Kocaeli, il avait fallu six mois avant la première arrestation. Par la suite, plus de 2.000 procédures ont été ouvertes contre les promoteurs des bâtiments effondrés mais aucune peine prononcée pour 1.800 d’entre eux en raison d’une amnistie générale décrétée en décembre 2000 par le gouvernement. Finalement, la plupart des responsables avaient pu bénéficier d’une prescription en 2007.
Dans sa déposition, le promoteur de la résidence Renaissance a rejeté les accusations portées contre lui et ses associés. « J’ignore pourquoi le bâtiment s’est effondré. Tous les permis avaient été délivrés après les études effectuées par la mairie et la compagnie de contrôle », a-t-affirmé. La Turquie a adopté une série de normes et de régulations calquées sur celles de la Californie, terre de séismes, et régulièrement révisées – la dernière fois en 2018. Mais selon les ingénieurs et architectes interrogés cette semaine par l’AFP, la plupart sont ignorées par les bâtisseurs.
Jade Peychieras
France Bleu